On continue sur notre lancée des activités alternatives à faire dans les Hauts-de-France : après les visites sur les toits avec Mindwide, les carrières souterraines avec Lou Ankh et Cyrille, on vous emmène cette fois dans un milieu tout aussi accueillant : les fonds subaquatiques !

La carrière de Vodelée, un spot très prisé des plongeurs locaux – Photo © Philippe Lahousse

Le football, c’était pas votre truc. Le tennis, encore moins. Vous étiez trop pauvre et trop simple pour jouer au golf, la marche Nordique, ça vous emballait pas, et franchement, le ping-pong, c’était pas votre tasse de thé. Vous aviez bien tenté deux trois sorties à la piscine, revigoré par les bonnes résolutions du nouvel an. Ah, mais voilà, il fallait bien vous rendre à l’évidence, il vous fallait trouver une activité sportive à la hauteur de votre caractère : un peu technique, un peu barrée et surtout avec une forte probabilité d’apéritif post-sportif (que d’aucuns appellent « esprit sportif »).

Vous aviez kiffé Le Grand Bleu, suivi assidument les expéditions de Jacques-Yves Cousteau en Mer Rouge, et liké au moins 1000 photos de rêve sur Instagram sur les fonds marins de Bali, des Maldives ou du Mexique. Bref, c’était évident, vous étiez fait pour vous jeter cœur et âme dans votre nouvelle passion : la plongée dans le Nord – Pas de Calais !

Fred, un plongeur dans sa cathédrale – Photo © Philippe Lahousse

Subir les vannes de ses potes

« Quoi, tu plonges dans le Nord ?! Mais tu plonges dans la DEÛLE OU QUOI ? ». Le (presque) plus gros danger pour le plongeur nordiste, c’est de faire face à tous ces lourds, persuadés que vous avez pété un plomb depuis que vous préférez vous lever à 7h le dimanche pour vous foutre dans une eau bien fraîche, plutôt que de cuver de votre soirée de la veille. Ce sera aussi l’occasion de vous énerver au repas de Noël, quand tonton Eugène, « qui a passé son brevet de plongée en 1972, et jamais plus plongé depuis », commence à raconter n’importe quoi sur les « accidents de décompensation » et invente carrément des pathologies « quand tes poumons se décollent de la plèvre vers -30m et que tes poumons se gorgent de sang » ou encore « cette fois où j’ai passé 4h sous l’eau avec un simple bloc de 12L ». Se mettre à la plongée, c’est avant tout se défaire de tous ces fonds communs, et découvrir un monde et des participants hors du commun. On imagine d’ailleurs que c’est une activité réservée aux riches, mais il n’en est rien : dans les clubs de la région, on se bat pour que chacun puisse avoir la chance de goûter au plaisir de se mettre à l’eau toute l’année, et le matériel est souvent prêté (ou loué à des tarifs préférentiels) aux candidats motivés.

Un « p’tit » brochet du coin – Photo © Philippe Lahousse

Développer quelques connaissances techniques

Pour plonger, il faut connaître un peu l’environnement. En plus de demander à votre médecin un certificat de non-contre indication à la pratique de la plongée, il va vous falloir vous former un peu avant de descendre au fond. Mais pas de panique, les fédérations du monde entier ont prévu le coup, et les niveaux sont relativement bien équilibrés, et répartis en commissions (plongée technique, apnée, souterraine, audiovisuelle, etc.) Par exemple, auprès de la FFESSM (Fédération Française d’Etudes et de Sports Sous-Marins – popularisée par Jacques-Yves Cousteau), le Niveau 1 permet de descendre à 20m avec un encadrant (Niveau 4 minimum) et éventuellement à 12m en autonomie (si vous avez passé la compétence adéquate), toujours sous la responsabilité d’un directeur de plongée qui vous présentera le site de plongée, vous donnera la durée maximale (éventuellement la profondeur maxi) et étayera les consignes de sécurité. L’autonomie, ça signifie que vous pouvez plonger avec un p’tit pote ou une p’tite pote du même niveau que vous, et gérer vous-même votre plongée (les sites que vous souhaitez voir, la durée à la profondeur maxi, etc). Chaque niveau de plongée alterne connaissances théoriques et applications pratiques, alors pas de panique, on y va toujours par étapes !

La carrière de Barges est réputée parce qu’elle est très accessible, et idéale pour s’entraîner à passer les niveaux – Photo © Philippe Lahousse

D’ailleurs, avant de vous lancer dans une formation, les clubs associatifs proposent tous de vous faire passer gratuitement un baptême, où vous passerez une vingtaine de minutes à -6m, le temps de vous familiariser avec l’équipement, de découvrir les premières sensations subaquatiques.

Tout est très bien organisé, et on ne vous enverra pas au fond si vos compétences techniques ne sont pas suffisantes. C’est un réel gage de sécurité pour tous, et ça invite de nombreux plongeurs à passer tous les niveaux, voire à devenir eux-mêmes des encadrants. Ce sont eux qui vont vous proposer un baptême (gratuit) en piscine, et vous donner le « virus » !

Un tacaud sur une épave en Mer du Nord – Photo © Philippe Lahousse

Une température de 5°c au fond, une combinaison humide toute l’année, une luminosité inexistante : des conditions DE RÊVE

Contrairement aux plongeurs du Sud-Est ou de Corse, qui doivent souvent hésiter entre plusieurs épaves magnifiques, des spots extraordinaires et une visibilité souvent très bonne, le choix dans le Nord est un peu plus simple : Mer du Nord si les conditions le permettent, Zélande (aux Pays-Bas), plans d’eau artificiels (comme le Lac de l’Eau d’Heure) ou carrières immergées. Ce sont ces dernières qui sont surtout plébiscitées, car elles sont accessibles toute l’année, à condition de faire partie d’un club agréé. Elles sont d’ailleurs, pour la majorité d’entre elles, très fraîches (entre 4 et 12° au fond et jusqu’à 18-20° en surface l’été), vous n’aurez aucune surprise à ce niveau là. Premier bon point.

L’entrée de l’une des « maisons » immergées – et à l’accès interdit – dans la carrière de Barges – Photo © Philippe Lahousse

Ensuite, si vous « résistez » aux températures d’ici, ça signifie peut-être que vous en avez une énorme votre capacité à tenir le froid vous mettra à l’abri de plein de petits désagréments… En somme, cela ne veut pas dire que si vous plongez dans le Nord sans accroc, vous n’aurez jamais à passer par la case « caisson hyperbare » dans votre vie de plongeur (parce que ça peut arriver à n’importe qui, du newbie au plongeur aguerri aux 3000 plongées profondes), mais ça veut dire que vous êtes résistant, et que vous pourrez sans doute vous contenter d’une combinaison fine quand vous irez plonger sur la Côte d’Azur ou en Corse (ou en Egypte, ou aux Maldives, ou…). Ah, et détail qui a son importance : on brûle énormément de calories dans une eau froide. En gros, tu fais régime en barbotant ! REP A SA LE RUNNING

 

Sexy et passe-partout, la combinaison étanche vous permettra des plongées au sec (et au chaud)

Enfin, pour les warriors qui souhaitent se confronter aux conditions extrêmes en permanence, des équipements spéciaux (et souvent couteux) existent : c’est le cas par exemple de la combinaison étanche, qu’on enfile au dessus d’un « pyjama » spécial, et qui ne prend – normalement – pas une goutte d’eau en immersion. Bien entendu, ça, c’est sans compter sur le sens de l’humour de vos collègues, et il est généralement admis que laisser une ouverture de 5-10 cm pour laisser l’eau glacée pénétrer sans la combi étanche est une blague plutôt courante chez les plongeurs du Nord. Non, je déconne, n’y pensez même pas ! (Certains ont des poignards).

Une étrille garde son épave en Mer du Nord – Photo © Philippe Lahousse

Pas de téléphone, pas de notifications, pas de mails. Juste votre gueule et celle de votre binôme (qui peut être moche).

Imaginez, le monde du silence… Aucun bruit au fond. Pas de sonneries stridentes, pas d’urgence à traiter. Pas de « petit coup de fil lourd » ou de notifications Facebook intempestives. Pas le moindre bruit. A part, bien sur, le bruit de votre détendeur et des bulles qui se forment (ce qui fait un sacré boucan). Ah, et les bips de votre ordinateur de plongée au poignet, qui va s’emballer au moindre événement (si vous plongez trop profond, si vous devez faire des paliers de décompression, si vous remontez trop vite, etc.). Et sans doute le bordel de votre binôme farceur qui tapera sur votre bloc en acier à la moindre occasion, pour vous montrer un brochet, un esturgeon ou juste pour vous embêter et troubler votre quiétude avec des signaux trop lourds du style « j’ai plus d’air », « je vais mourir, interviens stp » ou « pitié arrête de respirer sur ma bouteille ». Non, en réalité la plongée est rarement affaire de silence.

Tranquille cool peinard, ce homard aperçu en Zélande (Pays-Bas) – Photo © Philippe Lahousse

Des sites superbes et souvent sous-évalués

Encore une fois, quand on parle de plonger dans la région avec des « lambda », on se prend plein de moqueries dans la tronche. Bien entendu, on ne verra pas de dauphins faire leur ballet autour du Zodiac à Gravelines (encore que…), pas plus que de corail rougeoyant sur les sites de Zélande ou de requins longimanus (rigolez pas, c’est le nom) faire leur ronde à Duiktank. Pour autant, on trouve de superbes coins de plongée pour s’éclater (liste non exhaustive) :

  • les carrières de pierre immergées : anciennes exploitations de pierre (craie, marbre rouge, pierre noire, pierre richard, pierre qui roule…), elles offrent entre 40 et 50m de fond et des objets rigolos à voir au fond, comme le tank de Vodelée, les maisons à Barges, l’avion à la Gombe… en plus de donner un aperçu de toutes les espèces d’eau douce (brochets, carpes, esturgeons, perches…). Parfait pour passer ses niveaux, et plonger entre potes à un tarif raisonnable (entre 4 et 6€ la plongée).
  • les épaves au large de Dunkerque : vestiges de l’opération Dynamo (pour la plupart), ce sont des plongées pour les fans d’histoire et de biologie marine… pour peu que vous n’ayez pas le mal de mer !
  • le barrage de l’eau d’heure (c’est son nom) : idéal pour s’entraîner à passer les niveaux et pour travailler son orientation sous-marine, vous aurez l’occasion de rentrer dans un bus immergé, et même… dans un hélicoptère ! Après plongée, le terrain est très grand, et quand il fait beau, chaque club y va souvent de son barbecue.
  • Les spots « indoor », comme la fosse de Nemo33 (à Bruxelles) où l’on plonge dans une eau chaude sans combinaison (mais avec un maillot quand même), TODI qui offre une immersion en compagnie de 2200 poissons tropicaux ou encore au Duiktank (à Zwevegem) qui permet de bosser un peu pendant l’hiver dans une eau autour de 15°
  • La Zélande, au large des Pays-Bas : plongées depuis le bord de mer, avec une profondeur modérée et toute la faune de la mer du Nord représentée dans un mouchoir de poche. Le top !

Alors c’est certain, crier à vos contemporains votre nouvelle passion pour la plongée dans le Nord n’aura peut-être pas l’effet glamour escompté. Pour autant, c’est une activité passionnante, où les fonds sont toujours variés et où deux plongées de suite ne se ressembleront jamais. C’est une activité accessible, réalisable entre potes, qui ouvre un monde totalement méconnu. D’ailleurs à ce propos, les clubs associatifs organisent souvent des voyages, pour aller profiter de vos niveaux passés ici, en Mer Rouge, aux Maldives et dans tant d’endroits tellement horribles que vous ne voudrez jamais y mettre les pieds (ou les palmes).

Si l’aventure vous tente, il y a forcément un club à côté de chez vous qui acceptera de vous faire « buller » !

Plus d’infos : Comité régional de la FFESSM – http://www.ffessm-hdf.fr/

Les clubs nordistes organisent souvent des virées à l’étranger, comme ici en Mer Rouge – Photo © Philippe Lahousse

La carrière de Barges dans cette vidéo réalisée par Philippe De Korte :

Photos © Philippe Lahousse
Modèle : Frédéric Samain